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Par Yves Munn. Le 28 Octobre 2013
0À l’hiver 2013, dans le cadre d’un labo VTÉ, la Vitrine technologie-éducation (VTÉ) et le Centre d’étude et de développement pour l’innovation technopédagogique (CÉDIT) ont animé un espace de travail et de rencontres virtuelles ayant pour objet de creuser un peu plus le thème de la collaboration avec les technologies en éducation.
Cette variante du concept de « laboratoire vivant » est une sixième édition pour la VTÉ. Ces rassemblements virtuels ne sont pas des formations, mais des lieux d’expérimentation, d’exploration et de documentation sur l’utilisation des outils des technologies de l’information et des communications (TIC) dans un contexte d’enseignement. Un labo VTÉ se déroule généralement sur une période variant de quatre à cinq rencontres en ligne, qui ont lieu à toutes les deux ou trois semaines. Chaque rencontre est d’une durée de 90 minutes, au cours desquelles les participants sont invités à s’interroger sur les stratégies pédagogiques à utiliser avec les outils TIC et, dans ce cas-ci, à expérimenter pour favoriser la collaboration en classe ou à distance entre pairs.
Pour assurer la qualité optimale des échanges dans le groupe, nous avions limité l’inscription à vingt participants. Chaque participant devait s’engager, dans la mesure du possible, à prendre part à l’ensemble des étapes du laboratoire. Notre communauté de « laborantins collaborateurs » était formée d’enseignants, de conseillers pédagogiques et de membres d’organismes desservant le secteur collégial et universitaire québécois.
Entre le 12 février et le 26 mars 2013, ce sont près de vingt intervenants en éducation supérieure qui ont partagé leurs découvertes et leur expertise. Ils ont coconstruit des documents en ligne et ont expérimenté des outils technologiques en infonuagique, comme Google Drive et Cmap Tools. Il s’agissait d’outils TIC avec lesquels la plupart d’entre eux avaient rarement travaillé. La VTÉ avait aussi hébergé un wiki afin de pouvoir répertorier tous les documents de référence, les consignes d’étapes, les aides à la tâche, les rapports d’étapes, et afin d’encourager l’ajout de contenus par les participants. Le choix d’utiliser le wiki comme outil collaboratif pour ce labo VTÉ nous semblait évident puisque son utilisation en éducation est généralement connue et bien documentée depuis son apparition [1].
Les rencontres d’étapes s’articulaient autour des quatre thèmes suivants :
Les participants ont été invités à répondre à un sondage éclair sur l’utilisation qu’eux-mêmes faisaient des technologies dans un contexte de collaboration. Près du quart du groupe (23 %) n’utilisait que très peu, voire pas du tout, les technologies pour collaborer. Le reste du groupe les utilisait, entres autres, pour collaborer avec des collègues (41 %) ou à des fins pédagogiques (36 %).
Pour profiter des expériences pédagogiques antérieures des participants, ces derniers ont été invités à partager sur le tableau blanc de la plateforme utilisée quelques éléments caractéristiques d’une collaboration réussie avec ou sans l’utilisation des technologies. La liste des caractéristiques nommées est la suivante :
Selon Daniel LaBillois, enseignant et chercheur au Cégep de la Gaspésie et des Îles et membre du Centre d’étude et de développement pour l’innovation technopédagogique, les caractéristiques rapportées par les participants du laboratoire sont très précises et riches. Pour répondre à la question d’une collaboration réussie, il suggère de se tourner vers un cadre de référence à jour et bien fait, rédigé par le Centre de recherche et d’intervention sur la réussite scolaire (CRIRES) de l’Université Laval : Les pratiques collaboratives en milieu scolaire : cadre de référence pour soutenir la formation [2] :
Pour qu’il y ait une réelle collaboration, certains auteurs réfèrent à la nécessité d’un niveau d’interdépendance professionnelle, impliquant que les membres de l'équipe travaillent ensemble, partagent leurs connaissances, leur expertise, leurs expériences, leurs habiletés et leurs compétences individuelles dans le but de résoudre des problèmes communs [3].
L’accent doit être mis dès le départ sur l’identification d’un but commun pour réussir une collaboration, souligne Daniel LaBillois.
Les participants ont ensuite tenté de déterminer les conditions optimales ou les principes d’une collaboration réussie. L’une des principales conditions retenues par les participants est la suivante :
Daniel LaBillois ajoute que la collaboration ne peut être imposée et doit être volontaire. Si on l’impose, cela nuit au succès et aux autres conditions qui suivent. Il prend pour référence Interactions: Collaboration skills for school professionnals, de Friend & Cook (2010) [4] :
Interpersonal collaboration is a style for direct interaction between at least two co-equal parties voluntarily engaged in shared making as they work toward a common goal [5].
La collaboration nécessite la parité entre les participants. […]
La collaboration est basée sur la poursuite de buts communs [6].
LaBillois souligne l’importance de la contribution de tous les membres d’une équipe par le partage de ressources, de tâches et de responsabilités, ce qui permet de mettre en place une appartenance et une zone de confiance mutuellement partagées. Pour référence, il cite Friend & Cook (2010) [7] :
La collaboration requiert le partage des responsabilités. […] Les individus qui collaborent partagent leurs ressources. […] Les individus qui collaborent estiment et valorisent ce mode d’interaction interpersonnelle. […] La confiance mutuelle est présente au sein d’une équipe collaborative. […] Un sentiment d'appartenance accompagne les individus qui travaillent en collaboration [8].
Les participants observent que d’autres conditions ne sont pas à négliger, surtout lorsque l’outil de collaboration est technologique :
Collaborer à l’aide des technologies représente tout un défi autant pour les enseignants que pour les étudiants. Notre culture de collaboration et de partage dans laquelle nous avons évolué jusqu’à tout récemment se faisait essentiellement au cours de rencontres de travail en temps réel et en présence physique des autres collaborateurs. Dans d’autres cas, les travaux d’équipe pouvaient aussi être une mise en commun de travaux accomplis individuellement. Selon LaBillois, même s’il y a une bonne volonté, il faut travailler à développer une habitude de collaboration avec les technologies. Il cite notamment un article de Christine Vaufrey, publié sur Thot Cursus : Éviter la frustration dans les groupes de travail en FOAD [9] [10] :
Cette culture du partage du work in progress n’est absolument pas naturelle, surtout chez des apprenants qui ont été élevés dans la culture du « chacun pour soi » que l'on rencontre encore si fréquemment à l’école. Ce n’est pas la bonne volonté qui leur fait défaut, c’est l’habitude [11].
Lors des échanges, on tient à faire une distinction entre la collaboration et la coopération dans une perspective centrée sur les apprentissages en équipe. Ce sont des éléments auxquels les participants au laboratoire sont régulièrement confrontés même sans l’utilisation des outils technologiques, à savoir :
Dans un contexte de collaboration à distance, une perception de la collaboration asymétrique non souhaitable pourrait même s’installer si l’outil de collaboration ne permet pas le partage des travaux dès le début de la collaboration. À ce sujet, Vaufrey (2012) affirme :
(…) de récentes expériences nous montrent que le choix des outils de travail s’avère crucial pour minorer le sentiment de frustration qui peut empoisonner un travail de groupe à distance. (…)
Il est donc tout à fait intéressant d’utiliser des outils de production en ligne : outils de traitement de texte, de réalisation de cartes mentales et autres schémas, etc. Et surtout, de partager les travaux en cours, dès le début [12].
Daniel LaBillois, qui est coauteur du rapport de recherche et du Guide d’implantation. Pédagogies actives [13] au Cégep de la Gaspésie et des Îles, privilégie quelques stratégies pédagogies dites actives pour favoriser la collaboration. Le guide, téléchargeable en format PDF, présente les fiches descriptives et les démarches de stratégies suivantes :
Les participants ont également partagé d’autres méthodes et moyens qu’ils ont déjà utilisés et qui suscitent une bonne collaboration de la part des étudiants :
Certaines différences de comportements ont été observées par les participants du laboratoire sur le plan des habitudes de collaboration d’un programme collégial à l’autre. Le cas du programme de Sciences de la nature a été mentionné comme étant un peu plus difficile et plus compétitif, notamment en lien avec les exigences de la cote R. Par conséquent, la collaboration entre étudiants se croyant en compétition est plus ardue à instaurer.
L’enjeu des contributions asymétriques est un élément qui revient constamment dans un contexte de pratiques collaboratives. Il faut que les membres d’une équipe de travail réalisent individuellement et rapidement que chaque contribution est une « plus-value » pour l’ensemble du groupe. Par exemple, un participant du laboratoire a relaté que lors d’un projet en écologie dans son collège, des données statistiques étaient rassemblées par tous les étudiants de la classe. Cette expérience ne prenait un sens que si l’on mettait en commun l’ensemble des données de toute la classe. Dans ce cas-ci, l’utilisation de Google Apps for Education pour collaborer à plusieurs sur un même chiffrier est devenue un élément intrinsèque pour l’atteinte des objectifs. La collaboration a ensuite été évaluée par l’enseignant et par les pairs. Parfois, l’utilisation d’un forum de discussion en ligne destiné aux étudiants permet aussi de cerner des problèmes de contributions asymétriques et de trouver des solutions assez tôt dans le processus de travail.
Certains nouveaux étudiants arrivent au collégial avec de bonnes habitudes de collaboration qu’ils ont commencé à développer au cours des années au secondaire. On note que ces étudiants poursuivent leur développement d’habiletés de collaboration lorsqu’ils se retrouvent en classes d’apprentissage actif pour des cours en physique et en mathématiques. Ce type de pédagogie active contribue à favoriser la collaboration entre étudiants.
Voici quelques extraits tirés du wiki au sujet de ce que retiennent certains participants de cette première étape du laboratoire sur la collaboration :
La deuxième étape du laboratoire a permis de vivre concrètement une expérience d’écriture en mode collaboratif et synchrone dans l’outil infonuagique Google Drive. Les objectifs étaient de produire, en moins de 35 minutes, un document en petites équipes de travail, et de partager le document avec d’autres.
Les participants ont été répartis en équipes de huit ou neuf personnes parmi trois sous-ateliers de la plateforme en ligne utilisée pour la rencontre. Leur mission était de remplir une grille d’analyse d’outils d’écriture, qui comportait certains critères permettant de juger des fonctionnalités disponibles. Parmi ces critères, on comptait, par exemple, la présence ou l’absence d’une section clavardage ou d’une section commentaires, la possibilité de visualiser l’historique des modifications, la possibilité de faire du partage d’écran, la facilité d’utilisation et l’ergonomie, le partage de documents, les avantages et les inconvénients. Au besoin, les grilles pouvaient être modifiées ou bonifiées par les participants. Une synthèse de l’ensemble des travaux des trois équipes de travail est présentée dans le document, produit en mars 2013 et maintenant accessible en mode consultation sur Google Drive : Synthèse de l’activité d’écriture en mode collaboratif .
Les participants ont ensuite formulé leurs commentaires sur l’expérience de collaboration vécue en mode d’écriture. Les observations ont servi de pistes de réflexion sur la préparation et la planification future d’activités pédagogiques avec des étudiants. Un avantage est indéniablement la mise en commun des informations sur un seul et même document. Comme l’utilisation de l’écriture collaborative en mode synchrone ou asynchrone comporte un haut potentiel pédagogique pour la « classe active » et la « classe inversée », l’expérimentation a permis aux participants de se faire une meilleure opinion de l’efficacité des outils technologiques de collaboration.
La planification de l’activité de collaboration est aussi un aspect que l’on doit prendre en compte pour assurer la réussite d’une activité d’écriture en mode collaboratif. Les enseignants doivent prévoir le temps nécessaire pour préparer techniquement la création des comptes d’utilisation et des documents modèles à créer et à partager.
La taille des équipes de travail a également été mentionnée comme un élément important lors de ce type d’activité. Un participant a envisagé, pour sa part, de former des équipes de cinq personnes ou moins en plus d’alterner entre les modes synchrone et asynchrone.
Enfin, ces outils technologiques ont également un potentiel d’utilisation fort intéressant pour le travail à distance. Des participants ont affirmé distinguer plus facilement des services, tels que Google Drive pour la collaboration avec un certain espace de stockage, des services infonuagiques comme Dropbox qui sont plutôt pensés pour le stockage, le partage de fichiers volumineux et la conservation des données. La collaboration avec ce service se réalise donc moins directement.
Voici quelques extraits tirés du wiki du laboratoire :
En troisième étape du laboratoire, les participants devaient utiliser le logiciel gratuit CMap Tools en mode d’écriture collaborative pour aller au-delà d’une utilisation en solo de la conception d’une carte conceptuelle.
La majorité des participants avait déjà utilisé les cartes conceptuelles dans leur pratique, mais seulement le quart l’avait déjà fait en mode collaboration. Les principaux outils utilisés antérieurement par les participants étaient les suivants : Freemind, Lucidchart, Power Point, Word, Inspiration, Cmap Tools, Omnigraff.
Avant de commencer les travaux d’équipe, Nathalie Lefebvre, du Centre d’étude et de développement pour l’innovation technopédagogique, nous a fourni quelques explications afin de mieux distinguer une carte heuristique d’une carte conceptuelle.
Chaque participant devait ensuite accéder au serveur du Centre collégial de développement de matériel didactique (CCDMD), puis se connecter au document de l’un des trois groupes pour pouvoir travailler de façon synchrone. L’interface de la plateforme du laboratoire a permis de préserver un lien de communication audio pour pouvoir plus facilement coconstruire en ligne et pallier les difficultés plus techniques.
Cette fois-ci, la mission de chacun des groupes de travail était d’élaborer, en 40 minutes, un schéma de concepts autour de la question de départ suivante : Comment envisagez-vous la collaboration à l’aide des schémas avec vos étudiants ou vos collègues?
La carte conceptuelle représentée ici recoupe toutes les informations des trois cartes réalisées au cours de cette étape de laboratoire : Synthèse des applications pédagogiques.
Lors du retour sur l’expérience tous ensemble, les participants ont affirmé que les liens sémantiques de la carte constituent une réelle valeur ajoutée sur le plan pédagogique. Cmap Tools est cependant un outil technologique plus complexe à manipuler, surtout en mode de collaboration synchrone. Il faut initier graduellement les participants à cet outil. Quelques participants, dans le cadre de ce laboratoire, n’ont pas réussi à se connecter à leur groupe de travail. On recommande de démarrer l’utilisation de cet outil de façon individuelle pour bien comprendre son fonctionnement. C’est un exercice vraiment complexe lorsqu’il est réalisé en équipe. Les équipes de travail doivent comprendre entre trois et cinq personnes au maximum. Cela nécessite de mettre en place des règles et des rôles à établir entre les participants d’une équipe.
La valeur pédagogique de cet outil semble résider davantage dans le processus de réalisation de la carte que dans la carte elle-même qui a surtout une valeur pour ses créateurs. Le professeur doit faire réaliser des cartes par ses étudiants. « Imaginez une familiarisation avec l’outil dès la première session », a affirmé l’un des participants. « Imaginez la valeur ajoutée en deuxième et troisième année, alors que les étudiants deviennent experts avec cet outil. »
Voici quelques extraits tirés du wiki du laboratoire :
Lors de la quatrième et dernière étape du laboratoire, nous avons tenté de cibler quelques bonnes pratiques professionnelles qui favoriseraient la collaboration à l’aide des outils technologiques. Pour coconstruire un document de référence, deux équipes de travail ont été formées. La répartition des participants dans ces équipes s’est faite selon leur choix personnel d’approfondir l’expérimentation de Google Drive ou de Cmap Tools.
Chaque équipe devait répondre à trois questions suivantes :
S’en est suivie une compilation des différents éléments mentionnés qui ont permis de tirer quelques bonnes pratiques significatives à vérifier lorsqu’il est question de la collaboration à l’aide des technologies.
Le choix d’un outil technologique pour favoriser la collaboration peut dépendre de plusieurs variables techniques à prévoir :
Les bonnes pratiques d’accompagnement pédagogique nécessitent de se questionner sur les éléments suivants :
Voici une liste des conditions qui favorisent la collaboration dans un contexte d’utilisation d’outils technologiques :
Tous les participants pensent, qu’à la suite des expérimentations de ce laboratoire en mai 2013, ils devraient bénéficier des retombées collaboratives des TIC dans leur pratique respective. Plusieurs se sentent mieux outillés et prêts à parler de leur expérience de collaboration à leurs collègues et même à utiliser les outils expérimentés dans leur cours avec leurs étudiants. Voici quelques remarques tirées du formulaire d’évaluation de ce laboratoire :
Mais qu’en est-il vraiment de l’intégration des outils de collaboration dans la pratique? Un deuxième sondage, effectué quatre mois plus tard en septembre 2013, indique que, pour la plupart des répondants, c’est l’utilisation de Google Drive qui semble plus facile à intégrer pour le partage de documents et la collaboration en tant que telle. Le manque de temps et le sentiment d’aisance avec un outil sont deux facteurs invoqués comme obstacle à l’intégration dans les pratiques.
En fait, je ne suis pas encore suffisamment confiante avec ces technologies (Google+, Dropbox, CMap Tools, etc.) pour les enseigner à mes étudiantes. J'ai intégré à mon cours d'été des forums sur Moodle ainsi que le présentateur Prezi pour la rentrée, mais ça se limite à ça.
J'ai eu peu de temps à investir dans la maîtrise de ces outils.
Tout a bien fonctionné. Même pour des étudiants à distance, je n'ai pas eu de remarques négatives ou de problèmes signalés. J'irai plus loin au trimestre d'automne avec un autre groupe.
La Vitrine technologie-éducation vous propose maintenant de poursuivre le travail réalisé lors de ce labo VTÉ-CÉDIT. Le document en ligne, Vade-mecum 2.0 des bonnes pratiques de collaboration avec les technologies est ouvert à tous ceux qui aimeraient ajouter de bonnes pratiques de collaboration. Puisque ce document en demeure un à la portée de tous à plus ou moins un « clic », nous l’avons intitulé vade-mecum qui provient du latin et qui se traduit par « viens avec moi ». Pour y collaborer ou pour simplement le consulter, rien de plus facile. Il vous suffit d’accéder au document hébergé en infonuagique et d’y ajouter vos bonnes pratiques de collaboration.
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